L’université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD) a vibré, samedi dernier, au rythme des hommages appuyés rendus aux professeurs Abdoulaye Bathily et Boubacar Barry. Ces deux éminents historiens, dont les travaux ont marqué plus de quatre décennies de recherche et d’enseignement, ont été célébrés à l’issue d’un colloque international de trois jours sur le thème « Dynamiques autour du fleuve Sénégal ».
Organisé pour saluer leur contribution exceptionnelle à la compréhension de la Sénégambie et de l’histoire africaine, ce colloque a réuni des chercheurs, des universitaires et des étudiants venus du Sénégal et d’ailleurs. Les éloges prononcés à cette occasion ont mis en lumière l’impact profond de leurs travaux, qui ont redéfini les perspectives sur l’histoire africaine.
Une réinterprétation de l’histoire africaine
Le professeur Mamadou Bodian, rapporteur du colloque, a souligné l’une des plus grandes contributions des deux historiens : « Ils ont su articuler la longue durée des dynamiques africaines avec une critique du prisme européen. » Selon lui, Bathily et Barry ont démontré que la Sénégambie ne peut être réduite à une simple construction coloniale. « C’est un espace fluide, traversé par des mobilités, des résistances et des reconfigurations pertinentes », a-t-il expliqué.
En affirmant cette historicité propre, les deux chercheurs ont posé les bases de « l’histoire connectée », où le local et le global s’entrelacent dans un dialogue constant. Leur approche a permis de dépasser les récits dominants pour révéler la richesse et la complexité des dynamiques africaines.
Des parcours exceptionnels
Le professeur Saliou Ndiaye, prenant la parole, a rendu un vibrant hommage à Abdoulaye Bathily, décrivant ce dernier comme « un militant précieux pour le mouvement social sénégalais » et « un homme séduisant, tonifiant et vigilant ». « Son goût immodéré pour la liberté de penser et son ambition constante pour l’institution l’ont conduit à mener tous les combats pour l’amélioration des conditions de vie des enseignants, la réforme de l’université et le financement de la recherche », a-t-il déclaré.
Quant à Boubacar Barry, ancien recteur de l’UCAD (2010-2014), il a été salué pour son engagement sans faille envers la recherche et l’enseignement. « Il incarne l’exigence, la rigueur, mais aussi la liberté et la fraternité », a souligné un intervenant. Barry est reconnu pour son ouverture aux jeunes chercheurs, qu’il accueillait dans son bureau pour les écouter et les conseiller avec bienveillance.
Des témoignages émouvants
Prenant la parole, le professeur Boubacar Barry a exprimé sa gratitude envers le département d’histoire, les scientifiques et les jeunes chercheurs qui ont participé à ce colloque. « Cet événement m’a permis de mesurer à quel point l’essentiel de mon existence est voué à l’université », a-t-il confié.
De son côté, Abdoulaye Bathily a qualifié Barry de « meilleur historien de notre génération », louant son ouverture aux mondes académiques des cinq continents. « Ce colloque est un banquet de la connaissance », a-t-il déclaré, ajoutant que cet événement « fera date dans l’histoire de la communauté universitaire ».
Un plaidoyer pour l’africanité
L’envoyé spécial du président Diomaye Faye auprès de la Confédération de l’Alliance des États du Sahel a plaidé pour que ce « travail remarquable » se poursuive. Il a appelé à mettre l’université « au service du peuple et de l’africanité », soulignant l’importance de préserver et de valoriser les savoirs africains.
Ce colloque, riche en échanges et en réflexions, a non seulement honoré deux figures majeures de l’historiographie africaine, mais a aussi rappelé l’importance de l’histoire comme outil de compréhension et de construction de l’avenir.