Le 29 mai 1453, Constantinople tombait. Alors que Mehmed II entrait dans l’une des plus grandes villes du monde, les intellectuels byzantins débattaient… du nombre d’anges sur une épingle. Aujourd’hui, le Sénégal, à l’ère de la super-intelligence, semble figé dans une paralysie similaire.
Pendant que le monde avance à la vitesse de la donnée, notre administration comme l’a souligné le Président lors du CAMP reste engluée dans un illectronisme administratif qui freine le progrès.
Chaque mission administrative est une course d’obstacles : un courrier urgent traverse 40 km entre Diamniadio et Dakar, ralenti par les embouteillages et la bureaucratie. Pourtant, la signature électronique existe et pourrait réduire ce délai à quelques minutes. Mais elle reste sous-utilisée, piégée dans un cycle d’inaction. Nos sites web ministériels ne sont pas en reste. Plutôt que d’être interactifs et informatifs, ils se réduisent à des albums photo d’événements officiels, sans accès aux plans d’action, budgets ou démarches en ligne. Pendant ce temps, l’administration continue de gérer ses tâches sur Gmail et WhatsApp, alors que des outils collaboratifs existent déjà.
Mais le problème ne vient pas que des outils : il reflète une fracture générationnelle profonde. D’un côté, la génération X, qui a grandi avec la bureaucratie, la paperasse et une vision centralisée du pouvoir, où chaque validation doit passer par plusieurs niveaux hiérarchiques. De l’autre, les millennials, habitués à la vitesse, à l’instantanéité et à la flexibilité des outils numériques. L’un fonctionne avec des parapheurs physiques et des délais interminables, l’autre avec des workflows automatisés et des plateformes de gestion collaborative. Ce choc des visions ralentit la modernisation de l’État et empêche l’efficacité des processus administratifs.
Le paradoxe, c’est que le Sénégal ne manque pas de structures dédiées à la transformation numérique. Agences, cellules de digitalisation, comités de pilotage… les programmes existent mais sont dispersés, sans coordination ni impact concret. Résultat ? 12 % des objectifs atteints pour la Stratégie Sénégal Numérique 2025, un cadre de gouvernance faible et une communication inexistante sur les vrais enjeux.
L’intelligence mondiale double tous les 18 mois. D’ici dix ans, seules les nations ayant pris les devants resteront compétitives. « Code is law » : ceux qui maîtrisent les algorithmes écrivent les nouvelles règles du jeu. Pendant que nous débattons, d’autres avancent.
Le New Deal Technologique est une chance unique pour repositionner le Sénégal. Mais il ne doit pas devenir une réforme figée dans la lourdeur .Il doit être porté par l’écosystème numérique sénégalais : startups, hubs technologiques, entreprises privées. Le Sénégal possède déjà l’un des écosystèmes les plus dynamiques de l’Afrique de l’Ouest.
Mohamadou Manel Fall
New Public Management | Intelligence Économique |Ecosystem Building | Al Junkie| Tourism Expert
