Ceci est une crise qui fragilise des économies entières en augmentant les coûts des soins de santé tout en réduisant la productivité dans tous les secteurs. Cet écart au niveau de la santé est donc aussi une crise économique.
Les femmes africaines représentent 40 % de notre secteur agricole. Notre continent abrite également la plus forte proportion de femmes entrepreneures au monde et, d’ici 2035, il y aura plus de jeunes Africains qui entreront sur le marché du travail chaque année que dans le reste du monde réuni. La santé de nos femmes façonnera l’avenir de nos économies.
Les données sont claires : lorsque les femmes sont en bonne santé, tout le monde en bénéficie. Les femmes peuvent terminer leurs études, chercher de meilleures opportunités d’emploi, toucher un revenu et construire une vie meilleure pour elles-mêmes et leurs familles.
Plus tôt cette année, le Forum économique mondial (WEF) a publié un rapport qui a révélé que réduire l’écart de santé chez les femmes pourrait stimuler l’économie mondiale à hauteur de 1000 milliards de dollars par an. Et c’est l’Afrique qui a le plus à y gagner.
Mesures entreprenantes et décisives
En tant que ministres des finances, nous tenons les leviers nécessaires pour inverser les tendances actuelles. Il est impératif que mes collègues ministres et moi-même prenions des mesures entreprenantes et décisives pour investir dans la santé des femmes, car la santé de nos femmes est aussi la santé de nos économies.
Tout d’abord, nous avons besoin d’un programme clair et audacieux, qui intègre de meilleures approches au financement, encourage les innovations pour la santé des femmes et exhorte les dirigeants à reconnaître que la santé de celles-ci est essentielle à la croissance économique. La bonne nouvelle, c’est que l’Afrique joue déjà un rôle de premier plan dans l’avancement de cet agenda.
Je suis fière de siéger au conseil de l’Alliance mondiale pour la santé des femmes (Global Alliance for Women’s Health), aux côtés d’autres ministres africains. L’Alliance, créée pour être un organisme mondial et influent dédié à la santé des femmes, œuvre pour obtenir les nouveaux financements nécessaires pour combler une fois pour toutes les fossés qui existent aujourd’hui.
Le renforcement des capacités de fabrication de produits pharmaceutiques en Afrique représente aussi à la fois une énorme opportunité économique et une étape essentielle pour refermer les écarts au niveau de la santé des femmes, afin qu’elles puissent avoir un accès fiable et abordable aux produits qualitatifs dont elles ont besoin pour rester en bonne santé tout au long de leur vie.
Ici, au Maroc, nous prenons des mesures dynamiques avec MARBIO, une initiative conçue pour renforcer nos capacités biopharmaceutiques. Le travail de MARBIO comprend actuellement le transfert de compétences et le renforcement des capacités pour développer DMPA-SC, un contraceptif révolutionnaire qui met le pouvoir de la planification familiale directement entre les mains des femmes.
Une fois que ces efforts seront terminés (et auront reçu les approbations réglementaires), cet investissement pourrait rapporter des dividendes pendant des générations.
Augmenter le financement
Enfin, nous devons augmenter et améliorer le financement disponible pour la santé des femmes. Dans un contexte budgétaire serré, les ministres des Finances et les bailleurs de fonds peuvent adopter des approches pour réduire les risques liés à leurs investissements tout en veillant à ce que les ressources soient en place pour amplifier les innovations à fort impact et combler le fossé de la santé des femmes.
Les collaborations philanthropiques et les financements concessionnels disponibles auprès de partenaires tels que le Mécanisme de financement mondial (GFF) offrent de meilleures conditions aux emprunteurs. C’est quelque chose que le Nigeria a commencé à explorer, alors qu’il œuvre pour transformer son secteur de la santé et obtenir de meilleurs résultats au niveau de la santé des femmes et des enfants.
De plus, les partenariats avec des organisations clés dans le domaine de la santé des femmes, comme UNFPA Supplies, se sont révélés concluants dans des pays comme l’Éthiopie, où ils ont permis d’augmenter le financement national pour la planification familiale. Ce modèle peut et doit être reproduit dans toute l’Afrique, alors que nous travaillons ensemble pour combler les écarts dans la santé des femmes.
Investir dans la santé des femmes n’est pas seulement le bon choix ; c’est le choix intelligent. Pour chaque dollar investi, nous constatons un rendement économique de 3 dollars. Mais l’impact va bien au-delà des gains financiers. Les femmes en bonne santé sont le fondement de familles résilientes, de communautés florissantes et de nations prospères.
[…] Il est temps d’accorder la priorité à la santé des femmes – et de reconnaître son importance en tant que pilier du développement national et de la reprise économique mondiale.
Par: Nadia Fettah Alaoui Scidev
adia Fettah Alaoui est la ministre des Finances du Maroc depuis octobre 2021.