A défaut de se présenter devant l’Assemblée nationale pour s’expliquer sur l’affaire Fonds Covid-19, comme souhaité par les députés Guy Marius Sagna et Aminata Touré via une question d’actualité adressée au perchoir, le Premier ministre et son gouvernement ont fait face à la société civile hier, mardi 3 janvier 2023. Histoire de partager sur la gestion du fonds en question, voire de recueillir des recommandations pour l’amélioration du système de gouvernance de l’Etat.
Après le tollé général suscité par la publication du rapport de la Cour des comptes sur la gestion du fonds Force Covid-19 et les mille et une récriminations des Sénégalais sur les manquements relevés dans l’utilisation des 1000 milliards dudit fonds, le gouvernement est véritablement sorti du bois pour aborder frontalement cette sulfureuse affaire. C’est ainsi qu’un conclave sur le rapport final de la Cour des comptes sur la gestion du fonds Force Covid-19 a réuni à Dakar hier, mardi 3 janvier, le Premier ministre, Amadou Ba, des membres du gouvernement et des organisations de la société civile.
Durant ces concertations tenues à huis clos, le chef du gouvernement était assisté dans l’exercice par trois de ses ministres notamment Oulimata Sarr de l’Economie, du Plan et de la Coopération, Pr Ismaïla Madior Fall, de la Justice, Garde des sceaux, et Moustapha Ba des Finances et du budget. Quant à la teneur du débat, elle était centrée sur l’amélioration du système de gouvernance de l’Etat, sur la base des recommandations formulées en veillant à ce que chaque partie prenante assume sa part de responsabilité.
D’emblée, le Premier ministre Amadou Ba a invité les acteurs à tenir le débat dans le respect de l’esprit de l’audit, de la rigueur dans l’appréciation objective, des constats ainsi que de sa finalité comme l’a souhaité le président de la République en autorisant la mission d’audit et la publication du rapport.
Pour le chef du gouvernement, cette approche du Chef de l’Etat dénote son attachement à la transparence dans la gestion des deniers publics. «Le rapport de la Cour des comptes sur la base d’une analyse détaillée a mis en relief beaucoup de points positifs comme il a relevé des dysfonctionnements et des insuffisances dans des cas bien précis en pointant, notamment, le non-respect de certaines règles afférentes aux procédures de la dépense publique», a souligné Amadou Ba.
Pour ce qui est des manquements, le Premier ministre a évoqué des faits qui constituent des fautes de gestion présumées révélées par l’audit qui a formulé des recommandations, à cet effet, pour l’ouverture d’une information judiciaire concernant les auteurs. «Sur les 1000 milliards FCFA du fonds, les manquements relatés par la Cour et pour lesquels une suite judiciaire est recommandée portent sur 6, 6 milliards FCFA soit environ 0,7% du montant total décaissé. Ce montant apparemment modeste en valeur relative est extrêmement important puisqu’il s’agit de la gestion de ressources publiques et de surcroît en temps de crise sanitaire», a relevé le chef du gouvernement qui a déploré de tels agissements. Pour cause, a-til dit, «De telles pratiques, si elles sont avérées, heurtent l’éthique et n’honorent pas notre administration».
85 RECOMMANDATIONS D’ORDRE STRATÉGIQUEET OPÉRATIONNEL
Devant la société civile, le Pm Amadou Ba s’est par ailleurs longuement prononcé sur les détails du rapport de la Cour des comptes avec un accent particulier sur les recommandations des contrôleurs. « Les analyses de la Cour des comptes sont assorties de 85 recommandations d’ordre stratégique et opérationnel. 18 recommandations visent l’amélioration du dispositif de pilotage et de contrôle. Elles vont toutes dans le sens de mieux encadrer certains régimes dérogatoires en matière de marché public, de mettre en place dans le cadre de la gestion des crises, des cadres d’orientation, de suivi et de contrôle plus opérationnel».
Dans la foulée, le chef du gouvernement a expliqué que 55 sur l’ensemble des recommandations visent à l’amélioration du cadre de mobilisation des ressources ainsi que les modalités d’exécution des dépenses. Ces recommandations portent sur le respect des engagements dans le cadre des conventions de financement sur les ressources extérieures, mais également sur les besoins d’amélioration du système de la commande publique en matière de preuve et de maniement d’argent. «Pour les plus importants, on peut relever la justification des pièces de dépenses liées aux caisses d’avance dans les délais prescrits par la réglementation, la nécessité de faire jouer la concurrence dans les procédures de marché afin de réduire notamment les risques de surfacturation, l’exigence d’enregistrement de contrat des marchés avant leur exécution, la proscription de maniement de ressources publiques par des personnes non habilitées», a-t-il précisé.
En guise de conclusion, Amadou Ba a invité les organisations de la société civile à lui faire part de leurs contributions à promouvoir et ou à consolider en vue de l’amélioration du système de gouvernance de l’administration sénégalaise pour que les écarts constatés ne puissent jamais être commis à l’avenir. A noter enfin que pour ces concertations tenues à huis clos, la société civile était représentée par des organisations comme le Forum civil, le Gradec, le Cosef, le Congad, le Forum du justiciable, Amnesty international, Raddho, Lead Africa, Ascosen, la Plateforme des acteurs non étatiques, Osidea, le mouvement Y’en a Marre, Sos consommateurs, réseau Siguil Jigeen, entre autres.