Au Rwanda, les ruptures de stock de médicaments et la pénurie de matériel médical dans les établissements de santé appartiennent désormais au passé, grâce à une innovation qui répond aux contraintes d’approvisionnement.
Entreprise spécialisée dans les technologies de la santé et financée par du capital-risque, Viebeg Technologies contribue à élargir l’accès à des soins de santé à prix abordables en Afrique centrale et en Afrique de l’Est, en aidant les établissements de santé à s’approvisionner en temps réel. Elle utilise l’intelligence artificielle (IA) pour gérer les processus de la chaîne d’approvisionnement (de l’expédition à l’entreposage, en passant par la distribution et la gestion des stocks) afin de s’assurer que les établissements de santé disposent en stock du matériel médical requis.
Le Fonds rwandais pour l’innovation (Rwanda Innovation Fund), financé en partie par la Banque africaine de développement, a investi dans la plateforme logistique de Viebeg, axée sur les données.
Tobias Reiter, cofondateur et directeur général de Viebeg Technologies, indique que la plateforme d’approvisionnement médical pilotée par l’IA met directement en relation les prestataires de soins de santé avec les fabricants. Ce qui élimine les courtiers et les intermédiaires sur la chaîne de valeur, entraînant jusqu’à 40 % d’économies pour les clients.
« Nous avons constaté que de nombreux établissements médicaux ne disposent pas du matériel nécessaire. Et nous avons également appris qu’en Afrique, toutes les cinq minutes, des gens meurent des suites de maladies qui auraient pu être évitées si nous disposions du matériel médical requis », a relevé M. Reiter.
Créée en 2018, l’entreprise travaille avec de nombreux établissements de santé au Rwanda, où 2 millions de patients ont été traitées avec des produits Viebeg, selon Alex Musyoka, son cofondateur et directeur commercial. L’entreprise fait déjà une percée ailleurs en Afrique de l’Est – au Kenya, au Burundi et au Congo notamment –, et sert plus de 500 établissements. Selon M. Musyoka, l’entreprise compte s’étendre à l’ensemble du continent africain.
De nombreux établissements de santé au Rwanda font l’éloge de Viebeg, car ils peuvent désormais se procurer des produits essentiels dans leurs domaines spécifiques à des prix abordables. La clinique spécialisée Kivu, fondée par le Dr Amol Kulkarni, l’un des trois seuls chirurgiens maxillo-faciaux du Rwanda, en est un exemple.
Les équipements modernes sont de la plus haute importance pour les spécialistes qui traitent les défauts et les blessures de la bouche, des dents et des mâchoires, des soins souvent hors de prix en Afrique.
Dr Amol a indiqué que Viebeg avait aidé sa clinique à acquérir un appareil d’orthopantomogramme (radiographie dentaire panoramique des mâchoires supérieure et inférieure), ce qui a renforcé ses capacités de pointe. « Dans quatre mois, la clinique aura entièrement payé la nouvelle machine OPG, a-t-il précis ». Nous sommes considérés comme l’une des cliniques les mieux équipées du Rwanda. Viebeg m’a aidé à installer ma clinique et je suis désormais confiant, car Viebeg est mon partenaire pour la maintenir ».
De même, le centre chirurgical Ejo Heza à Kigali avait besoin d’un nouvel appareil d’anesthésie – après que l’ancien était tombé en panne –, mais n’avait pas les fonds pour en acheter un neuf. « Comme Viebeg offre des conditions de paiement préférentielles, Ejo Heza en est devenu client et a acquis le nouvel équipement en trois semaines. Ce qui a permis à notre établissement de continuer à sauver des vies », déclare Dr Dominique Savio Mugenzi, chirurgien orthopédique et directeur général d’Ejo Heza.
« Grâce au service de Viebeg, nous nous procurons désormais nos fournitures et équipements médicaux à travers la plateforme, ce qui a permis de réduire considérablement les coûts d’approvisionnement et les ruptures de stock de fournitures médicales », ajoute Dr Mugenzi.
Mukando Cesarie, est une patiente qui a expérimenté le pouvoir d’un établissement de santé bien équipé, d’autant mieux avec l’innovation de Viebeg : « J’étais très malade mais, grâce aux machines gynécologiques dont nous disposons ici, les médecins ont enfin réussi à diagnostiquer le problème. Maintenant, je vais mieux, après quatre interventions chirurgicales. Je remercie encore une fois pour ces services ». Elle souligne combien on lui a prodigué d’attention à l’hôpital Best Care de Kigali, en juillet 2022. Après avoir subi une intervention chirurgicale de 10 heures dans un hôpital local, son état s’était aggravé, car l’établissement ne disposait pas des équipements nécessaires pour établir un diagnostic précis.
Le revenu annuel de Viebeg est passé de 80 000 à 180 000 dollars, six mois après le financement du Fonds rwandais pour l’innovation, soit une croissance de 125 %. M. Musyoka escompte atteindre les 2,5 millions de dollars d’ici à la fin 2022.
Outre améliorer ses revenus, le financement a permis à l’entreprise de dispenser des formations à ses employés, de disposer d’un fonds de roulement et de recruter davantage de collaborateurs – entre autres.
La Banque africaine de développement a investi 30 millions de dollars dans le Fonds rwandais pour l’innovation. Le soutien de la Banque s’inscrit dans le cadre du plan NICI III (National Information Communication Infrastructure) du pays, qui mise sur les TIC pour améliorer la prestation de services aux citoyens.
« L’innovation numérique peut transformer des secteurs, mais elle nécessite des investissements, a déclaré Abdu Mukhtar, directeur du Développement industriel et commercial de la Banque. Viebeg est un formidable exemple de ce qui peut être réalisé avec le bon mélange d’innovation, d’esprit d’entreprise et de soutien financier. Cela montre bien que le Fonds rwandais pour l’innovation, lancé par le gouvernement rwandais et financé, en partie, par la Banque africaine de développement, a joué un rôle de catalyseur dans le développement de Viebeg. L’investissement local dans une entreprise locale a donné des résultats locaux transformateurs. C’est un modèle de partenariat qui peut s’appliquer à d’autres marchés ».