mardi, novembre 26, 2024

Autoroute à péage- Victime d’un montage financier, à la place de 140 milliards, le Sénégal reçoit 28 milliards de FCFA

0 commentaire

Le Sénégal a été victime d’un montage financier dans le cadre de la gestion et surtout de la rentabilité de l’autoroute à péage sur l’axe Dakar- AIDB où il a contribué à hauteur de 319,2 milliards contre 61 milliards de Eiffage SA. Ainsi, sont les révélations faites par l’économiste Dr Khadim Bamba Diagne.

Aspects juridiques et financiers de l’exploitation de l’autoroute à péage Dakar-Aibd: Quelles leçons tirées des contrats Cet (Contrats de construction-exploitation-transfert d’infrastructures)?

Tel est le thème autour duquel le think tank Legs Africa a réuni des experts afin de mettre en lumière les enjeux juridiques et financiers de l’exploitation de l’autoroute à péage Dakar-Aibd et ses enseignements majeurs.

A cette occasion, « l’intervention de l’économiste Dr Khadim Bamba Diagne a été axée sur le montage financier dont a été victime l’État sénégalais en ce qui a trait à l’exploitation de l’autoroute à péage Dakar-Aibd ».

Le rapport final « Débat multi-acteurs sur la redevabilité de la gouvernance des infrastructures et Ppp : suivi et vulgarisation de l’étude d’impact socio-économique et environnemental de l’exploitation de l’autoroute à péage » initié par Legs Africa indique que l’intervention du Dr Diagne met en exergue le déséquilibre considérable entre la subvention publique et le montant du financement privé.

En effet, renseigne le document, le total d’investissement de cette autoroute tourne autour de 380 milliards. 83, 95 % du financement de ce projet soit 319,2 milliards ont été octroyés par l’État sénégalais (193, 5 milliards) et les institutions publiques telles que la Banque mondiale (52,5 milliards), l’Afd (40 milliards) et la Bad (33,2 milliards).

Seuls les 61 milliards restants ont été subventionnés par la société Eiffage qui n’a, d’ailleurs, alloué en fonds propres que 20,8 milliards et a levé sa contribution financière restante auprès de la Boad (15milliards), l’Ifc (13,4milliards), la Bad (6,8milliards) et la Cbao (5 milliards).

Pourtant, rapporte le document, avec une rentabilité de l’autoroute estimée à 140 milliards sur une période de dix ans, le gouvernement sénégalais n’a encaissé que 28 milliards. De plus, poursuit-on, une hausse des charges d’exploitation de la part de Eiffage a été notée. « Celles-ci passent de 36, 652 à 56, 526 milliards. », renseigne le rapport.  Aussi, sur les 143, 750 milliards de chiffre d’affaires, les résultats courants avant impôts sont estimés à 10 milliards faisant ainsi gagner à l’État sénégalais que 3 milliards 200 millions comme impôts sur le bénéfice.

Selon nos confrères du site lejecos, le document qui cite Dr Khadim Bamba Diagne, signale que cette gestion non optimale de l’État sénégalais est illustrative du manque de contrôle et d’efficience sur ses propres infrastructures. Par conséquent il appelle ce dernier à songer davantage à la mise en place de stratégies défensives et offensives afin de gagner plus et de dépenser moins dans l’exploitation de ses propres infrastructures et plus largement ses ressources.

Celle-ci, souligne-t-il, devrait passer inéluctablement par l’inclusion des experts financiers dans ses projets afin qu’ils puissent donner des avis consultatifs ou mettre des entreprises de gestion qui auront l’initiation des dépenses de sorte que les recettes fiscales de l’État ne soient pas diminuées. Mais aussi, par un suivi et une continuité étatique qui devraient être permanents même lorsque l’alternance politique se produit.

Un avis grandement partagé par le président du Conseil national des dirigeants d’entreprises du Sénégal, M. Birane Yaya Wane, qui estime que le gouvernement de Macky Sall aurait dû travailler avec les Chambres de commerce (une main d’œuvre locale). Ce qui aurait aidé à minimiser les gains de Eiffage et maximiser ceux de l’État sénégalais. « Enrichir Eiffage c’est enrichir la France », renchérit-il avant de marteler qu’« aujourd’hui l’État valide tous les projets qui sont soumis par les acteurs économiques étrangers, pendant ce temps les acteurs locaux peinent à voir leurs ministres ».

Le plaidoyer de M. El Hadj Ibrahima Thiaw, expert financier à la Banque islamique de développement, appelle l’Etat à se doter d’entités disposant de tous les outils et techniques nécessaires pour conduire ses projets à terme. Selon lui, le fait, par exemple, qu’une disposition du contrat de l’autoroute à péage stipule que ce dernier est ferme et non révisable est problématique.

Il faudrait donc, explique-t-il, des arbitrages et expertises à l’avenir en vue de permettre à l’État de tirer le meilleur profit dans l’exécution de ce genre de projets. Une recommandation similaire a été émise pour le secteur privé qui gagnerait à se mettre à niveau en établissant un pedigree technique et financier, lequel pourrait d’ailleurs favoriser l’employabilité.

M. Abdoulaye Thiam, responsable opération à Ageroute, est d’avis que l’État du Sénégal aurait dû faire de l’exploitation Dakar-Aibd un contrat à régie intéressée surtout compte tenu de l’ampleur des transactions journalières estimées à 200.000 qu’Eiffage gagne actuellement. Toutefois, contrairement à Dr Khadim Bamba Diagne et M. Birane Yaya Wane, il estime que le gouvernement sénégalais n’a pas manqué d’experts financiers durant la signature de ces contrats.

Car, explique-il, celui-ci a tout de même réussi à renégocier les 25 % dans le capital, ce qui est salutaire, selon lui. Il en profite également pour enjoindre le gouvernement à demander au concessionnaire de financer sur fonds propres une troisième voie à partir de Thiaroye, qui jusque-là est inexistante. Celle-ci, ajoute-il, devrait être actionnée par les critères suivants comme l’occupation de la zone et le délai 2023.


Avec lejecos