vendredi, novembre 22, 2024

Contribution à la stratégie digitale du Sénégal

0 commentaire

Ce texte est une contribution à la stratégie digitale du Sénégal. Il s’est largement inspiré du document de référence : « Stratégie numérique Sénégal 2016-2025 », disponible sur Internet.

La modernisation de l’administration devrait être un prétexte pour transformer nos PME/PMI et engager la transition de l’économie informelle vers le secteur formel. Même si les TIC constituent un driver principal de l’économie, l’on doit également s’appuyer sur les autres technologies exponentielles, notamment sur l’intelligence artificielle, qui est en train d’impacter de larges secteurs d’activité.

Le développement d’un écosystème numérique nécessite surtout une mise en commun des différents acteurs. Par-delà l’édification d’une ville et d’un parc numérique sur l’axe Diamniadio-Sébikotane-Diass, il importe aussi de développer un « mindset » partagé qui accorde une large place au pragmatisme. Ce texte met l’accent sur 7 points :

  • connectivité haut débit,
  • cybersécurité et protection des données personnelles,
  • modernisation de l’administration et transformation des PME/PMI,
  • transformation des secteurs de l’économie grâce au numérique,
  • smart cities et apprentissage de la démocratie participative,
  • écosystème de start-up innovantes,
  • services fintech.

1. Connectivité haut débit

L’accès au numérique commence par cette connectivité. À ce niveau, si l’État crée et maintient le cadre institutionnel adéquat, les opérateurs feront le reste. Entre autres points, ce cadre doit aider au développement du secteur et organiser une saine concurrence entre les divers acteurs. Le document de référence cité plus haut est très explicite sur ce sujet. L’accès au numérique (à la connectivité haut débit) pour tous en 2025 est inscrit dans la vision.

2. Cybersécurité et protection des données personnelles

Le document dénommé « Stratégie nationale de la cybersécurité au Sénégal », ou  SNC 2022, adresse largement cette question de la cybersécurité. Une fois qu’on a accès aux réseaux et aux services, l’une des questions majeures est celle de la sécurité.

Pour ce qui est de la souveraineté numérique, de grands progrès peuvent être réalisés, mais vis-à-vis des mastodontes du digital, seules la Russie et la Chine ont cette faculté. Elles disposent de leur propre infrastructure Cloud, de leur propre moteur de recherche et de leur propre réseau social grand public.

3. Modernisation de l’administration et transformation des PME/PMI

Une forte modernisation de l’administration entraîne de la productivité à tous les niveaux de l’économie. Cela devrait constituer un prétexte pour transformer les PME/PMI et assurer la transition de nombreuses structures du secteur informel vers le secteur formel. En automatisant les processus de façon progressive, intelligente, et en les orientant vers le service (avec de la transparence, de la visibilité offerte par des workflows) et la disponibilité 24h/24, les acteurs économiques se libèrent des lenteurs et des frictions. Dès lors, le règlement des taxes s’en trouve optimisé et les possibilités de corruption réduites.

4. Transformation des secteurs de l’économie grâce au numérique

Les secteurs concernés sont : l’agriculture, l’éducation, la santé, l’industrie et même l’artisanat. On retrouve de grandes exploitations agricoles dans la vallée. L’objectif d’autosuffisance alimentaire devrait être couplé avec la modernisation des techniques de production et de distribution qu’offre le digital. Au niveau de l’industrie, l’on devrait encourager l’émergence d’un nouveau type d’entrepreneur absolument ambitieux, capable de percer non seulement le marché sous-régional, mais aussi le marché mondial.

Dans les secteurs de l’éducation et de la santé, de nombreuses initiatives sont en cours. Il faudrait juste qu’elles s’appuient sur les technologies aujourd’hui disponibles : blockchain, intelligence artificielle, internet des objets, biotechnologie, nanotechnologie, robotique, impression 3D, Cloud et TIC. Les TIC sont dopées par les nouvelles générations du Web : Web 3.0, Web 4.0.

5. Smart cities et apprentissage de la démocratie participative

La stratégie numérique inclut un volet de type « projet de ville numérique » sur l’axe Diamniadio-Sébikotane-Diass. En s’appuyant sur les données anonymisées (condition pour l’open data), il est possible de développer de nombreux services destinés aux citoyens.

Le concept de crédit social développé en Chine mérite une attention particulière. Une préoccupation centrale du responsable de la cité est de garantir la sécurité des citoyens. Mais pour mieux gérer la cité et optimiser son aménagement, il lui faut des données sur les activités socio-économiques de ses membres. L’apprentissage de la démocratie et de la citoyenneté active devrait s’appuyer sur les moyens numériques.

6. Écosystème de start-up innovantes

Cet élément constitue un socle très important. À l’image des USA, qui ont leur Silicon Valley, les Chinois ont leur côte Est, le Sénégal a inclus dans sa stratégie l’édification d’un parc numérique sur l’axe Diamniadio-Sébikotane-Diass. L’on devrait juste travailler à créer des synergies entre les différents acteurs de l’écosystème : des start-up, des spécialistes analystes du digital, des financiers (capitaux-risqueurs), des coachs agiles, des consultants, des mentors inspirants, des universitaires, etc.

Les start-up innovantes ne sont que des émergences de ce terreau fertile qui a en commun un mindset orienté vers le focus client, l’innovation, la résilience, la prise de risque, l’ouverture, etc. Cela exige une forte volonté politique pour créer le cadre et attirer « en même temps » tous ces acteurs. En Chine, l’État appuie ses grands champions ; de même, nous devrions œuvrer à la mise en place de plateformes multiservices du même type que Wechat.

7. Services Fintech

Ce secteur est très dynamique sur le volet mobile money avec ses différents services. À ce niveau, les acteurs attendent juste de l’État un cadre qui garantisse l’équité. À l’image des acteurs télécoms, ils feront le reste.

Pour conclure, disons que ces quelques lignes jettent la base d’une réflexion qui peut enrichir le document de référence cité plus haut. L’accent avait été mis sur les aspects liés à la connectivité. Cela se justifiait amplement il y a 5 ans. A ce niveau, de grands progrès ont été enregistrés. Il urge maintenant d’élargir  la réflexion, en jetant un regard critique sur l’ancienne vision et en y incorporant les autres technologies exponentielles. Une attention particulière doit être accordée à l’intelligence artificielle dont le potentiel d’innovation est immense, d’après de nombreux observateurs avertis.

PAR IBRAHIMA THIOYE

publié d’abord sur Seneplus