(Agence Ecofin) – Cette perte représente 40 % de ses avoirs en devises étrangères. Un enjeu majeur pour la stabilité économique de l’UEMOA, alors que les pressions sur les réserves n’ont pas diminué.
Entre 2022 et 2023, la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) a perdu l’équivalent de 5446 milliards FCFA soit plus de 8,8 milliards de dollars en devises, (aux taux de conversion de 2022-2023), censés être rapatriés par les opérateurs économiques et les banques locales sur les recettes d’exportation hors UEMOA.
Dans le détail, ce sont environ 14 % des recettes d’exportation hors UEMOA rapatriables qui manquent à l’appel en 2023, soit 2260 milliards FCFA. Ce chiffre, bien qu’en amélioration par rapport à 2022 où la Banque centrale avait enregistré un manque à gagner de 19 % – soit 3186 milliards FCFA qui auraient dû lui revenir conformément aux dispositions réglementaires – reste préoccupant.
Ces manques à gagner en devises pèsent lourd dans la balance pour la BCEAO. Selon les données compilées par l’Agence Ecofin, ils représentent plus de 40 % de ses avoirs en monnaies étrangères, qui s’élevaient à 8947 milliards FCFA entre 2022 et 2023. Si ces devises avaient été rapatriées comme prévu par la réglementation, les réserves de la banque auraient pu être renforcées de manière significative d’autant plus que, sur la période, elles ont subi de fortes pressions exacerbées par la hausse des prix des produits alimentaires et énergétiques.
La BCEAO impute ces manques à gagner au « non-respect des obligations incombant aux opérateurs économiques et aux établissements de crédit », en particulier au défaut de rapatriement des devises issues des ventes extérieures par les exportateurs et le manquement à l’obligation pour les banques de céder au moins 80 % des devises rapatriées. Malgré cette norme réglementaire stricte, 23 banques n’ont toujours pas respecté cette règle, selon les constats de la Banque centrale.
Dans l’espace UEMOA, la loi est claire : les opérateurs économiques doivent rapatrier toutes les sommes provenant de leurs ventes à l’étranger dans un délai d’un mois, à partir du moment où le paiement est dû. Cette échéance intervient généralement dans les 120 jours suivant l’expédition des marchandises. Les banques, qui jouent le rôle d’intermédiaires, sont chargées de faire revenir ces devises par l’intermédiaire de la BCEAO. Elles peuvent toutefois en conserver une partie pour couvrir leurs besoins en devises, selon les directives de l’institution. Si la réglementation évoque le rapatriement de « l’intégralité des sommes », la BCEAO a instauré une règle pratique : les banques doivent lui céder au moins 80 % des recettes d’exportation.
Toutefois, malgré une baisse de 2% des exportations hors UEMOA en 2023 qui se sont établies à 16 272 milliards FCFA, le rapatriement des devises a progressé de 6%, atteignant 74% des recettes. Les banques, pour leur part, ont cédé 86% des devises rapatriées à la BCEAO, une progression de 5%, supérieure au seuil réglementaire de 80%. Le taux de domiciliation des recettes d’exportation dans les banques locales a légèrement fléchi.
Selon la réglementation de la Banque centrale, tout opérateur économique résident qui vend des biens ou services à l’étranger doit déclarer et enregistrer ses opérations d’exportation auprès d’une banque agréée de l’Union si le montant de la transaction dépasse 10 millions FCFA, avec quelques exceptions. En 2023, 94% des recettes d’exportation ont été déclarées auprès des banques locales avant l’expédition des marchandises contre 95% l’année précédente.
Fiacre E. Kakpo