Les Cauris d’Or, les Guertés d’Or, les Calebasses d’Or, qu’on devrait plutôt appeler les Marteaux d’Or, sont en ce moment une aubaine pour tous les renards retors qui viennent encenser à coups de millions exigés en échange, des corbeaux bien naïfs, en les autoproclamant meilleurs managers, meilleurs challengers, meilleurs jeunes boss, meilleurs filous, et surtout meilleurs filons et meilleurs perdreaux de l’année.
Mbagnick Diop, incontestable « entertainman » qui a mérité le succès des Cauris d’Or, « Souche » pour les intimes, boss des entrepreneurs sans entreprise, a donné le « LA », et la symphonie bruyante des récompenses bidon, est à présent entonnée par toute une cohorte de rusés renards, qui décernent à partir de critères connus d’eux seuls, avec l’aide de vaporeux comités qui n’ont de scientifiques que le nom, à des entreprises qui, si leurs banquiers étaient consultés, n’auraient certainement pas été couronnées pour leur rigueur, des récompenses pompeuses et injustifiées.
Ces entreprises sont en mal de publicité, leur business-plan étant en berne, et leurs directeurs sont donc des proies toutes désignées pour ces faiseurs d’or qui font briller les plombs les plus obscurs. Souche en a perdu son ticket à nous prendre pour des buses, et il a de fait, révélé les méthodes de ce happening d’autocélébration convenue de soi-disant leaders. On devrait d’ailleurs dresser la liste des nominés depuis l’instauration de cette escroquerie intellectuelle pour ne pas dire escroquerie tout court, et nous pourrions voir avec effarement à de rares exceptions près, qu’ils se sont évaporés dans les limbes du néant.
Vous suffirait-il de payer l’équivalent de 15 ou 20 couverts à 200 000 frs, pour avoir un Cauris d’Or, un Guerté ou une Calebasse d’Or ? Nous en rigolerons… C’est mieux. Parce que si on ne rit plus, on doit se demander pourquoi tout notre establishment politique et gouvernemental, participe à ces autocélébrations de notre médiocrité nationale, qui ressemblent plus à un racket organisé, en payant en plus des tickets des tables qui garantissent telle ou telle récompense couverte de l’Or qui fait briller les entreprises bancales. Enrobez ces agapes de prestations de nos stars de la chansonnette, faites danser les potes des nominés ravis par tant d’honneur et le fromage tombe dans la gueule du renard. Voilà maintenant que cette mascarade sénégalaise se panafricanise et que nous allons assister à la célébration des entreprises les plus performantes de l’UEMOA, bientôt de la CEDEAO, et pourquoi pas de l’Univers… Pensez-vous vraiment qu’un entrepreneur sérieux prend le temps de jouer au corbeau pour écouter un renard lui parler de son ramage économique et de son plumage financier ?
Les majors qui comptent dans notre pays et qui participent réellement à son PIB ont-elles déjà reçu des Cauris, Guertés ou Calebasses de quelque métal que ce soit ? Les grands capitaines travaillent et n’ont guère le temps à accorder à ces renards charmeurs et champions eux, dans l’art de faire signer des chèques à des benêts en pâmoison dès qu’on leur tresse des lauriers.
Les renards ont été ravis et les corbeaux plumés. « Tout flatteur vit aux dépens de celui qui…a le temps de l’écouter… »
Par Jean Pierre Corréa, publié sur seneplus