Depuis un certain temps, sur la toile, précisément sur le réseau social twitter, les appels du pied d’une partie de la population sénégalaise, envers le milliardaire sud-africain Elon Musk (51 ans), se font de plus en plus nombreux. Une situation à la limite insolite vu la fréquence et la façon dont le propriétaire de twitter est systématiquement mentionné sur les messages de protestation émanant de citoyens sénégalais. Ceci, suite aux restrictions numériques effectuées par le gouvernement sénégalais, en marge des manifestations meurtrières qui ont éclaté depuis le 1er juin dernier.
« Elon According to the State of Sénégal has cut the internet, it is a violation of individual rights, Elon l’Etat du Sénégal a coupé internet, c’est une violation des droits individuels », dénonce un twittos parmi d’autres, faisant référence à la brutale suspension des données mobiles depuis le 4 juin 2023.
Des messages du genre il est facile d’en lire des dizaines sur le fil d’actualité. Les « lanceurs-d’alertes » espèrent ainsi attirer l’attention de Musk qui, dans un élan de solidarité au peuple sénégalais, privé de connexion mobile, déploierait les antennes de Space-X (une entreprise américaine spécialisée dans le domaine de l’astronautique et du vol spatial) sur le territoire national pour connecter GRATUITEMENT et ILLÉGALEMENT les populations sénégalaises. Ce qu’il faut savoir c’est que malgré toute la technologie ultramoderne et la puissance financière dont il dispose, Elon Musk (dont la fortune est estimée à 206,7 milliards de dollars US selon Forbes) est obligé de passer par l’État du Sénégal et ses ministère et services compétents, pour disposer d’une licence d’exploitation et autres agréments sans compter que ses services sont loin d’être gratuits encore accessible à tous…
Dans une série de post sur son compte twitter, Mountaga Cissé, analyste en technologies, médias et Télécoms, formateur en nouveaux médias l’a d’ailleurs évoqué en ces termes « Non, Elon Musk n’amène pas Internet au Sénégal en un claquement de doigts. Ce n’est pas aussi simple que ça en a l’air. Qui suit Musk sait qu’il est très réactif et répond à tout et n’importe quoi ! S’il n’a pas réagi, il y a une bonne raison », a-t-il commencé par dire comme pour ramener sur terre ceux qui levaient les yeux au ciel, guettant les fameux satellites en orbite, rêvant déjà d’un flot incessant et continue d’internet venant de Starlink. Non, malheureusement, ca ne marche pas comme ça !
Le formateur en médias s’est alors lancé dans une explication basique concernant le fonctionnement de l’internet satellitaire. « Je vais essayer d’expliquer le fonctionnement de l’Internet version Musk. Il ne suffit pas que Space-X déploie ses satellites Starlink dans l’espace et au-dessus du Sénégal pour que ça marche. Il faut bien sûr des antennes de réception avec un modem / routeur », précise Mountaga Cissé. Autrement dit, dans l’éventualité où Elon Musk, par extraordinaire, répondrait par l’affirmative aux complaintes justifiées d’une partie des sénégalais, il se serait forcément heurté au cadre juridique et aux contraintes d’ordre technique que seul le gouvernement sénégalais, à l’origine des actuelles restrictions, pourrait lever. Tout tourne en orbite autour de l’État sénégalais qui, à travers le ministère des télécommunications et l’agence de régulation des télécommunications et des postes (Artp), contrôle tout !
« En plus des satellites et des antennes, il aura besoin d’installer sur le sol sénégalais une ou des stations terrestres qui vont nécessiter l’octroi de fréquences par l’Artp Sénégal. À moins qu’il n’utilise les stations du Nigéria « voisin » d’où le déploiement est effectif », a précisé l’analyste spécialisé dans les Tic.
Cet appel à l’aide des contestataires au régime du président Macky Sall, vient peut-être du cas ukrainien, avec le rôle de « bon samaritain » joué par Musk. Mais, l’actuelle situation qui prévaut au Sénégal, aussi grave soit-elle, n’est pas la même que celle qui subsiste en Ukraine. Les enjeux géopolitiques et économiques sont totalement différents. Car, ce qu’il faut savoir, c’est qu’en collaboration avec les autorités américaines et Elon Musk, l’armée ukrainienne utilisait depuis le début de la guerre Russo-Ukrainienne, Starlink, l’internet à très haut débit qui exploite les satellites déployés par SpaceX.
Le milliardaire sud-africain, en guise de soutien, avait laissé gratuitement l’usage de son système aux Ukrainiens qui avaient reçu des Kit Starlink. Mais, en contrepartie, qu’a-t-il reçu du Pentagone ? Récemment, selon le site en ligne, lecho.be, Musk avait d’ailleurs déclaré qu’il n’était plus question que Starlink soit utilisé à des fins militaires. Finalement, rien n’est gratuit dans ce monde si l’on sait que la société SpaceX dont Elon Musk est le cofondateur, est l’un des deux prestataires privés à qui la National Aeronautics and Space Administration (NASA) a confié des projets tels qu’un contrat de transport de fret vers la station spatiale internationale (ISS.)
Et, sur twitter, Mountaga Cissé dans son thread (fil de discussion sur twitter) est persuadé que : « C’est cela qui explique son mutisme, selon moi. Il (Elon Musk) a besoin de l’État. Oui, il lui faut une licence d’exploitation délivrée par l’Artp Sénégalais en accord avec le ministère des communications, des télécommunications et de l’économie numérique Sur le site starlink.com/map le lancement au Sénégal est prévu pour le 4ème trimestre 2023. Musk est donc très probablement en négociation avec les autorités. Ces mêmes autorités qui ont bloqué l’accès aux réseaux sociaux depuis des jours. Donc le jour où il commercialisera son service Internet, il sera soumis aux mêmes règles que les opérateurs. Il fera aussi de même, couper » a-t-il alerté à juste titre. De potentiel « sauveur », Elon Musk serait plus proche d’un partenaire économique avec le gouvernement du Sénégal.
Donc l’internet via les satellites d’Elon Musk pourrait faire son entrée au Sénégal d’ici la fin de l’année 2023. Mais à quel prix ? Sous quelles conditions ? Pour quelle tranche de la population ? Le kit Starlink qui comprend un routeur Wifi, le bloc d’alimentation, les câbles et la base, coûte au minimum 350.000 FCFA hors frais de livraison. Ce n’est pas donné pour le « Goorgorlou » lambda qui peine encore à accéder à la 4G ou à la fibre optique. De plus, il faut compter trois à quatre semaines pour recevoir le kit Starlink avec au préalable une commande voire une précommande formulée en ligne. Tout cela pour dire que Elon Musk, réputé être un homme d’affaires intransigeant ne « brisera » pas les restrictions numériques d’un simple clic !