Thiak-Thiak, un terme qu’utilisait Jumia pour ses services de livraison, désigne les motos-taxis Jakarta qui sont devenus une réalité à Dakar, après les régions intérieures du pays. Ce phénomène qui inonde toute la banlieue dakaroise et plusieurs quartiers du département de Dakar, est prisé par les jeunes qui en font un business. En plus du service de livraison un peu partout à Dakar, en échange de quelques billets de banque, ils sont utilisés pour le transport de personnes. Nombreux sont les jeunes, happés par le chômage, qui s’adonnent à cette activité pour se faire de l’argent. Voici le train de vie de ces jeunes Sénégalais.
Le Thiak-Thiak est devenu un business florissant pour les jeunes qui en font une activité quotidienne. Happé par le chômage et les difficultés à trouver un travail, des jeunes dakarois se convertissent de plus en plus en conducteurs de Thiak-Thiak, communément appelés motos-taxis ou Jakarta dans les régions où le phénomène est déjà une réalité depuis fort longtemps. Ils s’adonnent à des livraisons à l’intérieur de la grande capitale et sa banlieue. Les ronds-points et quelques places publiques sont les lieux de rencontre/arrêts. Tôt le matin, ils se réunissent dans ces places habituelles, attendant le coup de fil ou un potentiel client pour démarrer la journée. Entre temps ils proposent leurs services à des passants qui se rendent dans des localités isolées, enclavées où les voitures ont du mal à accéder. Sous ce soleil ardent de lundi, un élément de Sud Quotidien effectue a fait immersion dans ce «business», notamment au rond-point Liberté 6 où les Thiak-Thiakmen sont visibles partout ou presque.
PLUS DE 6000 A 7000 FCFA DE CHIFFRE D’AFFAIRES PAR JOUR
Entre fou rire et blagues, Ousmane Keita, revenant d’une course à Thiaroye, lance : «quelle chaleur !» Avant de prendre un sachet d’eau pour se rafraîchir. Selon ce jeune qui frôle la vingtaine, cette activité est le seul moyen de se faire de l’argent et ne pas devenir le maillon faible de la famille. «On ne peut pas rester éternellement dans l’attente d’une aide de la part du président. Moi, je me suis lancé dans ce métier il n’y a même pas 6 mois et j’ai fait pas mal d’économies. L’activité est florissante car on peut faire parfois un chiffre d’affaires de 6000 F CFA par jour. Donc on s’en sort bien», révèle-t-il. Dans ce même sillage, un autre du nom de Abdoulaye Diakité dit avoir recouru au Thiak-Thiak par pure manque de travail. «Ici, dans ce milieu, il y a même des gens qui ont obtenu leur Licence et qui font le Thiak-Thiak pour survivre. Moi, personnellement, j’ai cherché du travail jusqu’à l’épuisement. Et, finalement, j’ai décidé de faire du Thiak-Thiak car c’est plus fructueux comme métier journalier», dit-il. Avant d’ajouter : «je viens de faire 3 courses qui m’ont rapporté 7000 F CFA et l’heure de la descente n’a pas encore sonné. Donc, ce qui veut dire que d’ici là, je pourrai avoir plus», explique-t-il.
LIVREURS LE JOUR, MOTOS-TAXIMEN LA NUIT
A mille lieues de là, au rond-point ZAC Mbao, dans la grande banlieue, c’est le même décor et la même ambiance qui règnent. Des jeunes assis sur leur Thiak-Thiak, d’autres font des va-et-vient à la recherche de clients avec le même refrain : «Thiak-Thiak». Trouvé en train de vérifier l’état de son engin, Samba Diop, dit Baye Fall, nous fait savoir que les tarifs dépendent des distances. «Le tarif le plus bas, c’est 2000 F CFA ; nos tarifs dépendent de la distance, des localités. Plus la distance est loin, plus le tarif s’élève. Moi, je préfère cela car on se remplit les poches beaucoup plus vite. On nous appelle de partout pour des livraisons et on ne se fait pas prier car c’est notre gagne-pain», lâche-t-il. Au-delà des livraisons de colis et autres bagages, ces jeunes utilisent leurs Thiaks-Thiaks comme moyen de transport de personnes. «Le jour, je me limite uniquement à la livraison. Mais, la nuit, je transporte des personnes, en échange de quelques pièces ou billets. 4 allers-retours suffissent pour clôturer la journée et rentrer», confie Alpha Omar Sylla. Et de souligner : «lors des grèves de transport aussi, nous devenons le plan B. Ainsi, on gagne plus car on augmente les tarifs. En gros, le Thiak-Thiak rapporte énormément parce que les gens ne peuvent pas se déplacer tout le temps ; donc ils sont obligés de faire recours au Thiak-Thiak pour les livraisons», détaille A. O. Sylla.
ACCIDENTS, IGNORANCE DES CONTENUS ET PROVENANCE DES COLIS, CES RISQUES DU THIAK-THIAK
Dans une ville au parc automobile aussi dense que Dakar, avec les nombreux accidents dangereux, le Thiak-Thiak est un métier plein de risques, malgré qu’il soit un business qui florissant, si l’on en croit Fallou Seck. Quid du transport de colis dont on ignore les contenus, la provenance ? «On ne disconvient pas qu’il soit un métier qui rapporte ; mais aussi avec de nombreux risques. On risque chaque jour nos vies sur les routes, surtout avec les autres moyens de transport qui ne nous laissent aucune chance. Combien sont ceux qui sont victimes d’accidents avec leur Thiak-Thiak ? Sans parler des risques que nous courrons en transportant des bagages dont on ignore la nature», fait-il savoir. Avant d’aller plus loin : «on nous appelle partout, parfois même sans connaître notre interlocuteur. Il nous remet juste ce qu’il a à faire livrer, après un accord sur le payement. Et hop, on part livrer. Cela pourrait être de la drogue. Mais c’est sérieux. Non ! On ne sait jamais et si on nous coince avec ce truc, on est foutu car les policiers sont dans la rue et ils attendent le moindre faux pas de notre part pour nous arrêter», avoue-t-il. Le Thiak-Thiak fait des merveilles pour ces jeunes dakarois. Et même s’il y a des risques, ces jeunes sont prêts à aller jusqu’au bout, à la recherche de richesse. Plutôt que de rester une charge pour la famille ou tendre la main.
Par Sud Quotidien