L’Autorité de régulation des télécommunications et des postes (Artp) a publié son rapport trimestriel sur l’évolution du marché de la téléphonie et de l’Internet. Les opérateurs sénégalais ont ajouté 341 553 lignes mobiles au premier trimestre de 2021. Free a gagné des parts de marché, alors qu’ Orange qui maintient son leadership a perdu du terrain et Expresso a vu sa position s’affaiblir.
C’est une évolution exponentielle. Une nouvelle percée dans le domaine de la téléphonie et l’Internet. Malgré la crise sanitaire liée à la pandémie du coronavirus, le secteur des télécommunications est resté sur une pente croissante. Une croissance qui rassure de la bonne santé du secteur. Seulement, si le secteur se comporte globalement bien, cette nouvelle percée de l’Internet et de la téléphonie mobile varie selon les trois opérateurs téléphoniques : Orange, Free et Expresso.
L’Observatoire de l’Autorité de régulation des télécommunications et des postes (Artp), chargé d’analyser et de présenter régulièrement les évolutions enregistrées sur le marché des communications électroniques au Sénégal a rendu public son dernier rapport trimestriel de mars 2021. L’Artp renseigne que le parc de lignes de la téléphonie mobile a connu une nette évolution au cours du dernier trimestre. Le parc est passé de 19 078 948 lignes en décembre 2020 à 19 420 501 lignes en mars 2021. Une évolution nette de 341 553 linges en valeur absolue, soit 1,79 %. Cette croissance nette trimestrielle représente un taux de pénétration de 116,3 % pour une population estimée à 16 705 608 habitants en 2020. Au même moment, le taux de pénétration de l’Internet au Sénégal est passé de 88,74 % en décembre 2020 à 90,71 % en mars 2021. Et la base clients cumulée des trois opérateurs de téléphonie est principalement tirée par la croissance des lignes prépayées.
«Le taux de pénétration prouve que le secteur n’a pas été trop impacté par le Covid»
Avec un taux de pénétration de 116,3 %, le consultant-formateur en nouveaux médias, Mountaga Cissé souligne que le secteur de la téléphonie mobile n’a pas été trop impacté, contrairement aux autres domaines de l’économie, par la crise sanitaire liée à la pandémie du coronavirus.
Mieux pour le consultant-formateur en nouveaux médias, cette bonne santé du secteur de la téléphonie aura un impact direct sur la croissance du pays. Mountaga Cissé : «Ce taux de pénétration montre que le secteur la téléphonie n’a pas été trop impacté par le Covid et cela aura un impact sur l’économie. Dans la mesure où s’il y a de plus en plus d’abonnés, la consommation va augmenter et cela va booster davantage l’économie. Parce que le chiffre d’affaires des opérateurs va augmenter et ils vont payer plus de taxes au Trésor public et créer également des emplois indirects».
Une analyse partagée par le directeur de socialnetlink.org, Basile Niane, selon qui, l’évolution du taux de pénétration montre que les abonnés ont augmenté et on pourrait atteindre les vingt (20) millions d’abonnés très prochainement. Ce qui représente un secteur assez fort pour les opérateurs et les consommateurs.
«Le taux de pénétration est assez élevé au Sénégal et c’est une bonne chose pour l’économie. Les technologies jouent un rôle important dans l’économie, mais elles sont très négligées parce que le secteur est un peu méconnu par rapport aux autres domaines», explique Basile Niane. Consultant en technologie de l’information et de la communication, il rappelle que ce taux de pénétration prouve que le Sénégal a encore des chances pour évoluer dans le domaine de l’économie numérique avec la stratégie Sénégal numérique. Et cela démontre aussi que le Sénégal est en progression par rapport aux autres pays francophones de la sous-région.
Par ailleurs, si le taux de pénétration reste favorable pour tous les opérateurs, tout en conservant un solide avantage, le leader du marché Orange a perdu du terrain au cours du trimestre en faveur de Free. L’opérateur leader Orange a terminé le mois de mars avec une part de 55 % des connexions mobiles, en baisse d’un demi-point de pourcentage depuis le quatrième trimestre.
Son rival, Free, est resté sur une tendance à la hausse et a augmenté sa part de marché à 26,33% en mars 2021, contre 25,51% en décembre 2020.
Expresso a vu sa position s’affaiblir davantage, sa part de marché ayant baissé de 0,32 point, passe de 18,96 % à 18,64 % sur la même période. La même tendance a été notée sur l’évolution trimestrielle des parts de marché de l’Internet des opérateurs. Orange passe de 64,15 % en décembre 2020 à 62,74 % en mars 2021, soit une baisse de 1,41 %. Pour la même période, Free passe de 25,75 % à 26,58 %, soit une hausse de 0,83 %. L’opérateur Expresso a enregistré aussi une légère hausse de 0,58 % en passant de 10,08 % à 10,66 %.
Pour Basile Niane, malgré ce léger recul, l’opérateur Orange garde toujours son leadership sur le marché national. Alors que Free a connu une augmentation mais son évolution ne dépasse pas les 30 % des parts du marché. Cela explique, d’après Basile, que Free est en train de se battre avec des offres alléchantes, mais il est toujours bousculé par le leader Orange qui essaye de s’arranger pour rester en tête des parts de marché. Basile Niane : «Orange est nettement supérieur malgré l’évolution de Free. Maintenant c’est à Expresso qui se trouve autour de 10 % des parts de marché de se battre. Donc pour le prochain trimestre, il faut s’attendre à des changements surtout au niveau des leaders qui sont en bas du tableau.»
Une lecture que partage le consultant-formateur en nouveaux médias, Mountaga Cissé. D’après lui, c’est vrai que sur la valeur relative, Orange a perdu des points au profit de Free qui a un peu grignoté sur les parts de marché, mais cela n’empêche pas de garder son leadership au Sénégal. «Que ça soit pour l’Internet que pour le mobile, Orange détient plus de la moitié des parts de marché. Les chiffres n’ont pas beaucoup changé, donc Orange a une constance sur toute l’année entre mars 2020 et mars 2021. Par contre pour Free et Expresso, les chiffres ont sensiblement un peu bougé», explique-t-il.
«Une nouvelle société nationale pour remplacer l’Adie»
En valeur absolue, le taux de pénétration montre que tous les opérateurs ont vu leurs chiffres augmenter. Cette évolution et cette différence sont aussi valables sur le marché du mobile que sur l’Internet mobile. Parmi les méthodes d’accès mobiles et fixes, les connexions Internet ont enregistré une augmentation nette de 329 289 depuis décembre pour une base installée totale de 15,15 millions.
Le taux de pénétration d’Internet a atteint 90,7 %, en hausse de 2 points de pourcentage par rapport au quatrième trimestre. Sur l’ensemble des utilisateurs, 97,8 % se sont appuyés sur l’Internet mobile via un combiné, ce qui représente 14,83 millions de lignes 2G/3G/4G.
Au sein de ce segment de marché, la 3G reste la méthode d’accès la plus populaire avec une part de 41,61 %, tandis que la 4G poursuit sa progression régulière à la deuxième place (35,4 % contre 32,9 % au quatrième trimestre de 2020). Concernant les réseaux d’accès ADSL/fibre, le parc installé haut débit fixe s’élève à 186 225 lignes, après avoir enregistré une nette augmentation de 8 862 depuis décembre 2020.
Cette bonne percée du numérique pousserait-il le Sénégal à vouloir moderniser et renforcer le secteur ? D’après le directeur de SocialnetLink, Basile Niane, l’Etat du Sénégal est en train de finaliser un nouveau projet de loi pour la dissolution de l’Agence de l’informatique de l’Etat (Adie) qui sera remplacée par une nouvelle société dénommée «Sonum».
«La Société nationale du numérique (Sonum) se chargera de gérer les infrastructures numériques, services de l’administration ainsi que la mise en œuvre de la politique d’informatisation de l’Etat. C’est bien de créer une société à la place d’une agence parce qu’il y a une opportunité qui est là pour mieux gérer les données. Mais surtout mieux exploiter cette surcapacité de la fibre optique pour essayer de développer l’économie numérique», indique Basile Niane.
Mais pour Mountaga Cissé, ce ne sera qu’un changement de nom. «On fait tellement de lois et de projets alors qu’on a tout ce qu’il faut. C’est l’exécution de nos lois qui pose problème, mais pas les textes», dit-il.
FALLOU FAYE- OBSERVATEUR