Le coordonnateur de l’Uvs, Professeur Moussa Lo, revient sur le bilan de l’année écoulée marquée par la Covid-19. Il évoque également les initiatives déployées par l’institution pour soutenir les structures publiques impactées par la pandémie.
L’année universitaire 2020 a été fortement impactée par la Covid-19. Que peut-on retenir comme bilan à l’Uvs ?
L’année 2020, malgré la Covid-19 et ses conséquences, est plutôt positive pour notre université, en dépit du grand nombre d’étudiants que nous accueillons dans nos Eno. Toutes nos activités administratives et pédagogiques ont pu se dérouler sans interruption, sous le signe du respect des mesures de sécurité sanitaire. L’année 2020 a permis de confirmer l’Uvs comme l’université qui incarne les valeurs d’innovation, d’agilité et d’adaptation.
Le personnel a adopté le télétravail tout en maintenant sa productivité. L’Uvs a su explorer de nouvelles méthodes d’interaction via les plateformes numériques que nous avons conçues. Les cours se sont poursuivis comme d’habitude, selon notre modèle d’enseignement à distance. Dans cette situation exceptionnelle et inédite, l’institution s’est aussi montrée particulièrement volontaire et altruiste pour participer à la solidarité nationale. Sa mobilisation a été immédiate dans la lutte contre la Covid-19 et a apporté des solutions à toutes les instances publiques et privées qui l’ont sollicitée.
Est-ce que, malgré la Covid-19, l’Uvs a pu dérouler correctement ses activités pédagogiques ?
Du fait de notre modèle d’enseignement à distance, nous n’avons connu aucun écueil pour la poursuite des activités pédagogiques.
Dès l’annonce de la fermeture de tous les établissements d’enseignement, nous avons élaboré un plan de continuité pédagogique permettant un fonctionnement sans interruption, compte tenu des habitudes de nos étudiants qui aimaient se retrouver dans les Eno. Dans ce cadre, nos enseignants se sont employés à maintenir les environnements d’apprentissage, parfois à travers les classes virtuelles, afin qu’aucun étudiant ne se sente isolé. Nous avons juste été perturbé par la fermeture des Eno qui a duré près de trois mois et qui a impacté le planning de distribution des outils de travail aux nouveaux bacheliers et le déroulement des examens qui se tiennent en présentiel. Un dispositif digital a tout de même été mis en place pour organiser les examens en ligne.
L’Uvs a-t-elle les infrastructures nécessaires pour accueillir un nombre aussi important d’étudiants?
Deux facteurs expliquent la forte croissance de nos effectifs en si peu de temps. Premièrement, notre modèle pédagogique, qui repose sur le e-learning, ou enseignement à distance en ligne, et pour lequel il y a une dématérialisation très forte des infrastructures. Les amphithéâtres, les salles de classe, ou les bibliothèques de l’Uvs sont en ligne, et nos étudiants peuvent y accéder tout le temps, quel que soit l’endroit où ils se trouvent, d’où notre slogan « Foo nekk foofu la ». Le second facteur qui a permis une croissance aussi importante de nos effectifs, c’est la densité de notre réseau d’Eno, qui maille l’essentiel du territoire. L’Uvs est en mesure d’accueillir un nombre conséquent d’apprenants, de façon très inclusive. L’Uvs est ainsi devenue l’université la plus « féminine » du Sénégal, puisque les étudiantes y représentent près de 50% des effectifs, contre une moyenne nationale de 34%. L’inclusion est également territoriale, la moitié de nos étudiants sont issus de départements dans lesquels il n’existe aucune université publique, en dehors de l’Uvs.
Actuellement, le réseau est composé de 13 Eno répartis sur tout le territoire national et atteindra, à terme, 50 Eno pour couvrir tous les départements. Dans les prochaines semaines, nous procéderons à la réception des Eno de Pikine, Podor et Thiès. La livraison prochaine de nouveaux espaces annoncée par notre ministre de tutelle constitue une étape très importante pour la montée en puissance de notre institution.
Quelle analyse faîtes-vous du modèle pédagogique de l’Uvs ?
L’Uvs, créée en 2013, a commencé avec cinq formations en 2014. Après trois années d’expérience du e-learning, nous avons après étude et analyse, constaté que nos élèves titulaires de baccalauréat n’ont pas toutes les connaissances informatiques indispensables pour débuter une formation basée sur l’e-learning. L’Uvs, après trois années de fonctionnement, a alors décidé de changer de modèle pédagogique et adopter le comodal, qui est un système de formation où coexistent de façon simultanée les modes de formation en présentiel et à distance.
La conversion à distance d’un certain nombre d’heures de présence en salle doit s’effectuer dans le respect des exigences du règlement des études. Ce nouveau modèle essaie de régler les problèmes liés à la technologie.
Le modèle consiste à enregistrer le cours magistral du professeur à l’avance. Le professeur, avec un tuteur, fait le modèle de Td/Tp (travaux dirigés/ travaux pratiques) à l’avance. Les tuteurs relais font les Td/Tp en synchrone avec enregistrement. Par la suite, les étudiants sont regroupés en salle de classe et suivent les cours vidéos des professeurs et font des séances de classe virtuelle (synchrone) en présence physique dans les Eno. Un moniteur (étudiant de niveau supérieur) en salle de classe accompagne les apprenants et un tuteur répond en synchrone ou en asynchrone aux questions des étudiants via des outils de communication dédiés.
En 2021, après sept ans et l’arrivée de 20.000 nouveaux étudiants et le contexte de la Covid-19, le modèle évoluera avec une nouvelle approche basée sur les dispositifs mobiles.
Quelles sont les difficultés rencontrées dans l’enseignement à distance ?
Comme tout système, l’enseignement à distance connaît certes des difficultés. Mais il n’y a pas de difficultés insurmontables. Lorsque l’Uvs avait été créée, de nombreuses voix s’étaient élevées pour clamer que l’enseignement à distance n’était pas possible au Sénégal. Aujourd’hui, la trajectoire qu’a connue l’Uvs montre qu’elles ont eu tort. Il est donc important d’identifier les difficultés, mais le plus important, c’est la capacité d’imaginer et de mettre en œuvre des solutions pour surmonter ou dépasser ces difficultés. Quand on parle d’enseignement à distance, les difficultés les plus importantes concernent l’autonomie des apprenants, leur socialisation, la connectivité (ordinateurs, Internet), l’environnement d’apprentissage, l’accompagnement des apprenants (tutorat), la formation des enseignants etc. Par rapport à toutes ces difficultés, l’Uvs a imaginé et mis en œuvre des solutions innovantes. La mise en place du réseau des Eno est l’une de ces solutions.
Est-ce que l’Uvs partage son expérience avec les autres universités publiques obligées de faire un enseignement bimodal avec la crise de la Covid-19?
De la même façon que l’Ucad est l’université mère qui a accompagné la mise en place de toutes les universités publiques du Sénégal, l’Uvs a joué ce même rôle, en ce qui concerne l’enseignement à distance vis-à-vis des dernières universités publiques créées. Notre institution a accompagné aussi l’Université du Sine-Saloum El Hadji Ibrahima Niasse, l’Université Amadou Makhtar Mbow, ainsi que les Isep de Diamniadio, Thiès, Richard-Toll, Matam, Bignona, dans la mise en place de leurs plateformes de formation à distance. Aujourd’hui, l’Uvs a signé des accords de coopération avec toutes les universités publiques du Sénégal et avec le réseau des Isep.
Propos recueillis par Aliou KANDE, Le Soleil