Le directeur du Réseau Ethique en journalisme, Aidan White, refuse de considérer la liberté d’expression comme une condition première pour l’exercice du métier de journalisme. Pour ce spécialiste des médias qui faisait une communication dans un amphithéâtre de Withwatersrand, une université d’Afrique du Sud, le journaliste est tenu de mesurer les éventuelles conséquences de ses écrits, de ses paroles, de ses vidéos et de ses images.
La ville de Johannesburg est la capitale de la presse africaine du 9 au 13 novembre 2014. Plus de 600 participants comprenant ceux qui sont en cours de formation, des journalistes à la retraite et ceux en activité se sont retrouvés en Afrique du Sud, où se tiennent à la fois plusieurs activités ayant trait à l’exercice du métier de journalisme. Certains suivent des sessions de renforcement de capacité thématique. D’autres reçoivent des rudiments sur l’exercice de cette profession en pleine mutation avec l’implosion des Tic qui ont favorisé l’avènement des « nouveaux journalistes », c’est-à-dire des citoyens ordinaires qui s’adonnent à la diffusion de vidéos et de messages à travers l’internet. Ces nouveaux défis ont été passés au crible par Aidan White, le directeur du Réseau éthique en journalisme (Ejn), au cours d’un panel organisé par l’Initiative africaine des médias (Ami).
Ce spécialiste des médias, faisant face à un amphithéâtre presque rempli de professionnels des médias, a pris son courage à deux mains pour ramer à contre-courant des principes établis. Ce n’est pas étonnant, il est dans une université où la critique est bien perçue. « Le journalisme, ce n’est pas la liberté d’expression », objecte Aidan White. Le silence assourdissant traverse l’amphithéâtre. Il passe à la phase de la construction de son argumentaire. Il remet au goût du jour le choix délibéré par certains organes de presse de ne pas parler de certains faits à un moment précis comme le génocide au Rwanda, l’approche habile de traitement des informations liées à la religion y compris dans des pays démocratiques, l’autocensure, entre autres. « Aujourd’hui, le journaliste y compris le journaliste indépendant doit, avant tout, mesurer les conséquences de ce qu’il va écrire, diffuser à la radio ou à la télévision. Le journalisme, c’est la responsabilité », soutient Aidan White.
Selon ce dernier, les mutations induites par les nouvelles technologies de l’information et de la communication exigent des professionnels des médias la rupture dans le traitement et la diffusion des informations.
Parce que, de nos jours, tout ce qu’ils écrivent, disent ou diffusent est plus accessible et plus soumis à la critique des lecteurs, des auditeurs et des téléspectateurs, et est partagé à travers le monde. « Le journaliste n’est plus seul dans l’exercice de son métier. Il y a aussi l’audience. Celle-ci commente, analyse et critique des productions de journalistes grâce aux réseaux sociaux et aux fora sur la toile. Il faut que le journaliste soit, de nos jours, plus responsable », clame le directeur Aidan White de Ejn. Il fallait s’attendre à la fin de son examen critique qu’il reçoive des jets de questions des professionnels des médias. Du reste, certains ont pris note de la radioscopie de cette profession qui est à la croisée des chemins un peu partout à travers le monde.
De notre envoyé spécial à Johannesburg, Idrissa SANE du Soleil