Je suis écologiste. Je pense que l’on a peut-être survendu la 5G. Ce réseau ne remplacera pas tous les réseaux fixes ou mobiles existants, la disponibilité des performances annoncées sera progressive et il ne suffira pas pour faire basculer nos industries dans l’économie numérique. Mais je regrette que la lutte contre cette norme, qui représente de nombreux progrès par rapport à la 4G, devienne le symbole d’un engagement en faveur de la transition écologique. Reprenons les trois arguments des opposants à la 5G.
Les seuils d’exposition aux ondes sont identiques à la 4G.
C’est dangereux ou plutôt c’est éventuellement dangereux. Je voudrais faire remarquer que les seuils d’exposition du public aux ondes électromagnétiques n’ont pas été modifiés pour la 5G. Il sont identiques à ceux que l’on connait pour la 2G, 3G et 4G. Or jusqu’alors, aucune étude officielle française ou internationale n’a fait état d’un danger, y compris au regard des fréquences hautes et millimétriques qui sont ouvertes à la 5G. Naturellement, il est sain que la vigilance demeure et que les études se poursuivent.
Moins d’énergie consommée pour plus de capacité.
Deuxième argument, la 5G consommerait trois fois plus d’énergie que les précédents standards. Précisons sur cette question qui parait avoir retenu l’attention des membres de la Convention nationale pour le climat que si les premières stations 5G peuvent consommer effectivement plus que les 4G, les progrès des antennes, par focalisation des émetteurs, par l’intégration de l’électronique, par des dispositifs de mise en veille, devraient très rapidement permettre d’économiser plus de 50% de l’énergie pour une bande passante (débit et capacité) cinq fois plus élevées. Les réseaux de télécommunications devraient donc continuer à faire état d’une baisse de leur consommation d’énergie.
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Ajoutons qu’ils devraient avoir beaucoup moins de difficultés que les secteurs des transports à limiter la part de leur consommation fondée sur des énergies fossiles. Bien sûr cette efficacité énergétique (bits/unité d’énergie) du réseau peut se trouver annihiler par la consommation des data centers et des terminaux, la poursuite de l’intensification des usages pour des applications parfois médiocres, ou l’augmentation sans limite de la définition des images. Il y a donc place pour une certaine éducation des usages mais ne caricaturons pas.
Un ingrédient utile pour stimuler l’innovation numérique.
On en vient ce faisant au troisième reproche : finalement la 5G ne servirait à rien. Je me souviens d’un ministre des PTT qui dans les années 60 ne voyait pas trop pourquoi les français auraient besoin d’un téléphone. Actuellement le trafic sur les réseaux mobiles double tous les 18 mois. Même si les opérateurs vont parfaire leurs réseaux 4G. la première utilité de la 5G sera d’apporter des capacités supplémentaires, par les fréquences qui seront ajoutées ainsi que par son efficacité propre : plus de bits par hertz. On peut faire la fine bouche devant des applications grands publics qui paraissent futiles (n’oublions pas toutefois, les 10% de foyers qui ne seront jamais desservis par la fibre et qui devraient bénéficier d’accès fixes et sans fil grâce à la technologie 5G). Mais les enjeux sont aussi ceux de la numérisation de nos entreprises, de la modernisation de nos systèmes de santé, etc.
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Au-delà de la capacité et de la vitesse, la 5G va apporter de la sécurité et de la fiabilité, de la souplesse -c’est un réseau qui sera programmable en temps réel, avec par exemple une latence d’1 milliseconde permettant l’interconnexion de robots sur un site industriel, ou la connexion avec des équipes médicales d’intervention mobile, ou la gestion flexible de milliers de capteurs sur une aire portuaire… Bien sûr, il n’est pas certain que les applications retenues par les centaines de projets expérimentaux conduits actuellement en Europe associant opérateurs, intégrateurs, développeurs et start up à des acteurs de multiples secteurs d’activité préfigurent les priorités qui seront confirmées dans les années qui viennent. Ils illustrent néanmoins le potentiel de cette technologie pour stimuler l’innovation numérique.
Ne faisons pas de la 5G l’otage du légitime débat que nous devons avoir sur la transition énergétique.
Yves Gassot, ancien directeur général du Think tank IDATE DigiWorld.
Publié d’abord sur La Tribune