Au Sénégal, les problèmes de couples se réglaient traditionnellement en famille loin des yeux indiscrets. Depuis quelques années, cette tendance s’est un peu essoufflée. La nouvelle mode est chez certains individus de publier les aspects débridés de leurs vies de couple sur les réseaux sociaux, notamment dans des groupes ou pages Facebook.
Un époux qui exprime ses peines avec sa femme par ci, une épouse qui étale ses soucis avec son homme par là. Sur certains groupes Facebook, les notions de vie privée et d’intimité sont depuis quelques années, remises en cause.
Les dénominations de ces groupes sont presque toutes les mêmes, « Sama djeukkeur, sama life », « Diongué beugue sa dieukkeur »… Ces cercles virtuels constituent pour les femmes des sortes d’écoles où elles apprennent à ferrer leurs hommes et à maintenir le bonheur dans leurs couples. Ainsi, les témoignages très intimes au sein de ces communautés en ligne mettent en lumière des réalités qui échappent aux canaux de communication traditionnels.
Outils de solidarité
Ces communautés rassemblent de parfaits inconnus à la recherche d’oreilles attentives et les réseaux sociaux se révèlent parfois comme de puissants outils de solidarité. Dans ces espaces spécialisés en groupe de soutien aux couples, il est facile de retrouver des personnes qui traversent les mêmes épreuves que soi. C’est ce que nous révèle Fanta Touré, une des administratrices de « Djongué beugg sa dieukkeur », un groupe Facebook qui compte 142355 membres. « Les gens n’ont plus confiance aux personnes qui les entourent. Ils se méfient de tout et ont peur de la réaction de leurs proches s’ils venaient à découvrir leurs problèmes. C’est pourquoi ils préfèrent faire appel à des groupes Facebook où personne ne les connait », explique-t-elle.
Depuis 2019 Fanta Touré fait partie de ce groupe, elle a toujours eu comme ambition d’aider ceux qui en ont besoin et de s’enrichir en retour. « Je trouve le groupe instructif parce que nous débattons de sujets qui nous tiennent à cœur surtout pour nous les femmes mariées en ce qui concerne la façon de gérer nos foyers et nos époux etc. Il y a aussi les publications anonymes qui permettent à certains membres ayant des problèmes et ne sachant pas à qui se confier de pouvoir recueillir le plus possible de conseils et de pouvoir en tirer le meilleur », confie-t-elle.
Une forte présence des hommes
N’allez surtout pas croire que ces communautés ne regroupent que de femmes. Les hommes également sont très présents dans ce genre de cercles. C’est l’exemple d’Elhadj Ousseynou Diop. Il est le créateur du groupe « Djongué beugge sa dieukkeur». Selon lui, ce genre de groupes peut-être un moyen efficace de diminuer le taux de divorce au Sénégal. « J’ai créé ce groupe pour aider à faire améliorer nos vies de couple afin de diminuer les divorces précoces », argue-t-il.
Souley Boye, lui est membre du groupe « sama dieukkeur sama kharite ». Même s’il déplore le fait que certains étalent leur vie privée sur le net, il est aussi d’avis que cette plateforme est un moyen d’entraide. « Je trouve le groupe enrichissant malgré quelques petits défauts dus aux imperfections de certains membres. Ce qui me plait le plus c’est qu’on puisse nous entraider entre hommes et femmes pour mieux pimenter nos couples », fait-il savoir.
« Je me prépare à ma future vie de couple »
Les groupes Facebook spécialisés sur la vie de couple constituent également des « terrains d’entrainement » pour les futurs mariés. Voulant appréhender ce qui leur attend dans leur vies de couple, certaines femmes n’hésitent pas à rejoindre ces plateformes pour s’armer d’astuces. « Je suis membre de »sama dieukeur sama xarite » et de »femmes chics » parce que je veux apprendre de l’expérience des autres femmes pour me préparer à ma future vie conjugale. On y prodigue des conseils, sur le concept du « jongué » et d’autres astuces. Cela m’aide à mieux comprendre le fonctionnement des couples », confie M. Ndiaye.
Les groupes de discussion se multiplient sur le net au même rythme que les pervers pullulent dans la ville. Sur ces réseaux, il faut aussi noter que de véritables obsédés profitent de la vulnérabilité des femmes mariées pour leur faire des propositions indécentes.