vendredi, novembre 22, 2024

Comment des start-up africaines ripostent contre la COVID-19

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Depuis le début de la pandémie dans le continent, les jeunes africains, particulièrement, les startupers se sont montrés très imaginatifs pour pallier certaines carences des systèmes de santé. Ainsi, visières, respirateurs et applications sont développés ici et là pour soigner ou prévenir la maladie. En attendant leur homologation, certaines de ces solutions sont déjà utilisées face à la crise sanitaire. Socialnetlink partage avec vous cet article de fond réalisé par des journalistes de scidev.

 

La pandémie de la COVID-19 a ramené à la surface la fragilité des systèmes de santé en Afrique subsaharienne. Avec notamment l’insuffisance des outils de diagnostic de la maladie et des instruments de prise en charge des cas sévères.

En réponse à cette situation qui représente une importante pesanteur dans la riposte des Etats du continent, des start-up proposent un ensemble de solutions pour renforcer la lutte.

Ainsi, devant la pénurie des kits pour réaliser les tests généralisés de dépistage de la COVID-19, de jeunes Burkinabè ont développé une application baptisée DiagnoseMe. Celle-ci permet d’identifier les cas les plus suspects ou les plus probables qui vont ensuite être privilégiés pour les tests.

“Nous n’avons pas assez de fonds pour acquérir les kits de dépistage. DiagnoseMe permet de faire le tri pour savoir quelles sont les personnes prioritaires à dépister. Ce qui permettra d’économiser les kits de dépistage”

Adama Sy Traoré, ingénieur en électronique, Burkina Faso

Pour cela, l’utilisateur répond à un questionnaire qui permet de connaitre sa température et de savoir s’il tousse ou éternue, s’il a été en contact avec un cas confirmé ou s’il a récemment séjourné dans un pays touché par la COVID-19.

« L’application permet aussi de mesurer la fréquence respiratoire grâce au micro du téléphone, afin de savoir si la personne n’éprouve pas des difficultés respiratoires. A l’issue du test, à l’aide des protocoles de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et du ministère de la santé burkinabè, un algorithme permet de traiter les résultats », indique Adama Sy Traoré, ingénieur en électronique et concepteur de cette application.

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Les résultats générés ensuite peuvent être : « négatif », « probable », « peu probable » ou « suspect ». Les personnes suspectées d’être atteintes de la COVID-19 sont alors contactées par la cellule de veille mise en place par les autorités burkinabè qui pourra, au besoin, envoyer une équipe d’urgence.

« Nous n’avons pas assez de fonds pour acquérir les kits de dépistage. DiagnoseMe permet de faire le tri pour savoir quelles sont les personnes prioritaires à dépister. Ce qui permettra d’économiser les kits de dépistage et de protection du personnel de santé », indique Adama Sy Traoré.

Concours

En février dernier, cette application a fini 12è sur 300 compétiteurs au « Hack for Wuhan », un concours de solutions innovantes contre le coronavirus lancé depuis la Chine à l’attention des développeurs du monde entier.

Elle a en outre remporté en avril le concours « Innov Challenge Covid-19 », un appel à propositions de solutions numériques innovantes pour lutter contre le coronavirus, organisé par le ministère en charge de l’économie numérique du Burkina Faso en collaboration avec le Programme des nations unies pour le développement (PNUD).

« Il est toujours bon pour le patient d’avoir une idée de sa sérologie. C’est le problème que DiagnoseMe tente de résoudre », analyse Rodrigue Guiguemdé, le directeur général du développement de l’industrie numérique au Burkina Faso.

Ce dernier poursuit en disant que « le fait de connaitre grâce à cette application qu’il y a une forte concentration de malades dans une zone donnée est un outil d’aide à la décision ».

L’application DiagnoseMe

Emmanuel Sorgho, le secrétaire général du ministère de la Santé, estime pour sa part que Diagnose Me est une solution qui permet de faire un pas de géant dans la lutte contre le coronavirus. Il appelle au passage à prendre des dispositions en vue de sa vulgarisation.

Une autre application, dénommée Pandemic Tracker a été développée par des informaticiens ivoiriens et béninois pour tracker les personnes porteuses de la maladie. Aussitôt installé sur un smartphone, elle permet de localiser l’utilisateur à partir de son numéro de téléphone.

Selon l’Ivoirien Jean Delmas Ehui, l’un de ses concepteurs, le principe de fonctionnement de l’application repose sur la mise à jour des données faites par le ministère de la santé et de l’hygiène publique de Côte d’Ivoire.

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Ainsi, tout individu dépisté, quel que soit le résultat, rentre dans la base de données avec son numéro téléphonique. Et l’utilisateur de Pandemic Tracker reçoit automatiquement une alerte dès qu’il se retrouve à proximité d’une personne malade ou à risque.

« L’identité complète du patient n’est pas affichée, juste l’information qui permet à l’utilisateur de prendre lui-même ses précautions. Ainsi, si ce patient devrait être en confinement et qu’il se retrouve à l’extérieur, il est facile d’alerter les autorités », précise le technicien.

Confinement

A en croire Jean-Delmas Ehui, la conception de cette application est partie du fait qu’on ne peut pas faire en Afrique un confinement rigide comme en Europe. « Il fallait trouver une solution pour appliquer les mesures barrières et suivre les personnes à risque et les malades et leurs contacts pour leur prise en charge », dit-il.

Pendant ce temps, l’ingénieur Ibrahima Kane du Sénégal propose une plateforme digitale d’intégration communautaire pour aider à stopper la propagation de la maladie. Son objectif est de servir de moyen de communication entre les populations et les autorités publiques ou les entreprises.

A travers cette application, n’importe quel individu ou groupe d’individus peut signaler facilement tout risque sanitaire qui surviendrait dans sa zone, avec la possibilité de géolocalisation, d’envoi de notes vocales ou d’ajout de photos.

Cette application baptisée Sunu City pourrait donc être à la fois un outil de sensibilisation et d’information pour les populations, mais aussi un moyen de signalisation des cas suspects ou des rassemblements non autorisés.

Coordonnées GPS

« Ainsi, à partir d’une console d’administration, les agents du ministère pourront voir, en temps réel, les informations envoyées par les populations et pourront soit répondre directement via la plateforme, soit descendre sur le terrain, en cas de besoin, grâce aux coordonnées GPS[1] », souligne Ibrahima Kane.

La cellule de communication du ministère de la Santé a confié à SciDev.Net que le ministère étudiait la possibilité d’associer cette plateforme comme d’autres à ses supports de communication pour qu’elle vienne en appoint car « les canaux traditionnels que sont la radio et la télévision semblent très adaptés par rapport aux cibles larges que nous visons ».

En attendant, Ibrahima Kane souligne qu’au-delà même de l’épidémie du coronavirus, le ministère de la Santé pourra toujours se servir de cette plateforme dans ses missions de prévention des maladies, car les annonces publiées sur Sunu City peuvent être distribuées suivant un ciblage par zone géographique, en fonction de la résidence de l’utilisateur.

Au Togo, trois jeunes spécialistes des technologies de l’information et de la communication (TIC) ont lancé l’initiative de fabrication de respirateurs artificiels et surtout de visières de protection à l’aide d’une imprimante 3D.

La présentation du respirateur et des visières fabriqués au Togo.

Oussia Folly-Bebe, Sylvestre Olando et Komlan Akakpo de l’INSE (Institut national des sciences de l’éducation) de l’université de Lomé, avec l’appui du comité scientifique de ladite université, ont ainsi mis ensemble leur talent pour proposer une solution à cette crise qui expose davantage le personnel soignant.

« Nous avons les compétences techniques ainsi que les technologies nécessaires et nous nous sommes demandé ce que nous pouvons faire avec notre imprimante 3D, les découpeuses et accessoires pour assister le corps médical durant cette crise », explique Oussia Folly-Bebe.

« Nous avons alors identifié les solutions sur lesquelles nous pourrons travailler et proposer des outils qui pourraient être directement utilisables ici », poursuit-il.

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En quelques semaines, 500 visières de protection ont été produites et distribuées en majorité auprès des pharmacies où elles sont surtout utilisées par les vendeurs qui sont exposés, au niveau des comptoirs, aux clients venant de l’extérieur.

A en croire Oussia Folly-Bebe, des médecins font aussi la demande et des modèles sont en évaluation pour choisir ceux qui leur conviennent le mieux. « Car, ils ont des normes un peu différentes », dit-il.

Au même moment, deux jeunes ingénieurs du Centre régional polytechnique intégré de Kigali au Rwanda ont présenté au mois d’avril un prototype de respirateur artificiel conçu et fabriqué localement.

Le respirateur fabriqué au Rwanda

D’après Stephen Rulisa, professeur d’obstétrique et de gynécologie à l’École de médecine et de pharmacie à l’université du Rwanda, et qui a coordonné la mise au point de ce respirateur, « le nouveau prototype de machine fonctionne sur la base de ventilateurs et d’autres composants  ordinaires qu’on retrouve sur le marché local au Rwanda ».

Cette innovation initiée avec le concours du ministère rwandais de la Santé utilise en l’occurrence un moteur réducteur, des cartes électroniques et autres pièces mécaniques pour la production de cet appareil désormais très demandé parce que nécessaire pour la prise en charge des cas graves de COVID-19.

Cette initiative rwandaise rejoint celle de l’Agence universitaire pour l’innovation au Cameroun qui a récemment présenté le prototype d’un respirateur artificiel construit dans son de production situé à Bafoussam dans l’ouest du pays.

Mais, l’agence dirigée par Serge-Armel Njidjou propose surtout un autoclave pour la stérilisation du matériel médical en milieu hospitalier ainsi qu’un portique pour la désinfection des personnes dans les lieux publics.

Placé par exemple à l’entrée d’un service, celui-ci détecte l’arrivée d’un individu et déclenche automatiquement l’opération de désinfection des mains de l’intéressé en ouvrant le robinet ou en produisant du gel hydroalcoolique.

Pour l’heure, ces applications et appareils, ainsi que beaucoup d’autres, sont en cours d’homologation.

 

Par: Abdel Aziz Nabaloum, Charles Djade, Julien Chongwang, Aimable Twahirwa , Pape Bess Diba , Issiaka N’Guessan